ALLAITEMENT ET MALADIE CHEZ LA MÈRE (2ème PARTIE)

Voir aussi ALLAITEMENT ET MALADIE CHEZ LA MÈRE (1ère PARTIE)

Certaines maladies infectieuses

Une discussion complète sur toutes les maladies infectieuses et l’allaitement pourrait donner un livre de la taille de Guerre et Paix. Je vais donc essayer de parler, brièvement, de celles qui causent le plus de problèmes chez les médecins et, par corrélation, chez les mamans qui allaitent. Il faut noter que si une maladie infectieuse n’est pas mentionnée ici, les mamans peuvent allaiter en toute sécurité.

Hépatites

L’hépatite est une infection du foie et celles qui inquiètent le plus par rapport à l’allaitement sont l’hépatite A, B et C. Il existe d’autres virus, mais ils causent rarement une infection du foie.

Hépatite A

Ce virus s’avère être du même type de virus que nous avons mentionné dans ALLAITEMENT ET MALADIE CHEZ LA MÈRE (1ère PARTIE) par le fait qu’au moment où la mère s’aperçoit qu’elle est malade, non seulement la phase virémique (lorsque le virus est détecté dans le sang) est entamée depuis plusieurs jours ou même plusieurs semaines. De plus, bien que l’infection par le virus soit possible par les excréments, l’infection par ceux-ci n’est pas vraisemblable non plus, dès lors que la mère montre des symptômes, car le virus ne se trouve plus dans le tractus intestinal. Autrement dit, à partir du moment où la mère est clairement malade, elle ne peut plus transmettre l’infection à son enfant, que ce soit en se trouvant auprès de lui ou en l’allaitant. Si, à un stade antérieur, le bébé a contracté le virus, l’allaitement aidera à diminuer le risque d’infection. S’il n’est pas infecté alors que la maman ne montre pas les signes de la maladie même si elle est, elle-même, infectée, continuer d’allaiter diminuera probablement la gravité de l’infection. De toute façon, arreter l’allatement et changer au lait artificiel ne protegera le bébé, et risque même d’empirer la situation sans la protection immunologique de l’allaitement.

Si, à un moment anterieur, le bébé avait été exposé au virus avant que la mère montre des symptômes mais quand même se trouve contagieuse, la continuation de l’allaitement diminuera la sévérité de l’hépatite chez l’enfant.

Il est vrai que l’hépatite, si elle est sévère (elle peut être légère ou même asymptomatique) peut causer une fatigue importante chez la mère, avec des douleurs abdominales, une incapacité à se nourrir ainsi qu’un sentiment de faiblesse. La mère éprouvera donc des difficultés à s’occuper de son bébé. Il est préférable que la mère se mette au lit avec son bébé et qu’elle l’allaite ainsi.

Hépatite B

L’hépatite B est similaire à l’hépatite A dans le sens que les symptômes sont très semblables ; jaunisse, fatigue, douleur abdominale. Comme l’hépatite A, toute personne infectée ne développera pas la maladie. Cependant, contrairement à l’hépatite A, près de 10 à 15% des personnes infectées par l’hépatite B deviendront des porteurs chroniques du virus. Cela signifie que les fluides corporels peuvent être infectieux même si les porteurs ne montrent aucun symptôme de la maladie. Comme pour l’hépatite A, par le temps que la mère développe des symptômes, il est possible qu’elle avait déjà passé le virus au bébé. Il n’y a cependant aucune preuve que le virus se soit introduit dans le lait.. Et l’allaitement peut encore protéger le bébé.

Quand la femme enceinte est porteuse chronique du virus d’hépatite B, l’allaitement est toujours recommandé.

Il est actuellement recommandé dans la plupart de juridiction que le nouveau né d’une mère avec l’hépatite B soit immunizé avec le vaccin contre l’hépatite B et donné une injection d’immunoglobulines contre l’hépatite B, les deux dans les 12 heures après la naissance.

Hépatite C

L’image clinique de l’hépatite est similaire à l’hépatite A et l’hépatite B, bien qu’elle soit souvent plus légère. Néanmoins, comme avec l’hépatite B, être porteur chronique de l’hépatite C n’est pas rare.

Il est maintenant possible de guérir le porteur(euse) de l’hépatite C avec des medicaments. Il y a plusieurs traitements possibles que l’on peut employer pour le traitement du porteur chronique qui ne requiert pas l’arrêt de l’allaitement, puisque la majorité des médicaments employés sont trop grandes pour entrer dans le lait.

Il n’y a aucune preuve que l’allaitement puisse transmettre l’infection au bébé. De nos jours, le traitement médicamenteux pour la personne affectée d’hépatite C chronique est disponible.

Virus de l’immunodéficience humaine (VIH)

C’est un virus particulier dans le sens qu’il attaque et détruit le système immunitaire. Il peut être transmis au bébé par le lait maternel. C’est pourquoi, jusqu’à récemment, l’allaitement était considéré comme contre-indiqué alors que le lait en poudre était considéré comme sûr et réalisable.

Pourtant, à présent, avec un traitement efficace qui traitera la mère ainsi que le bébé, les recommandations pour l’allaitement ont considérablement changées. Lorsque le traitement commence pendant la grossesse et que le bébé le prend dès la naissance, l’allaitement est devenu possible et également préférable et pour la mère et pour le bébé.

Virus de l’herpès

Aujourd’hui, on connaît 9 virus de l’herpès différents, causes de maladies chez l’humain. Il est probable qu’à l’avenir plusieurs autres soient découverts. En plus des boutons sur la peau, les lèvres, la bouche et les parties génitales, les virus de l’herpès sont également la cause de varicelle, mononucléose infectieuse et des lésions sur la rétine des yeux. Il faut remarquer que la grande majorité des infections par virus de l’herpès ne causent aucun symptôme. La personne est infectée mais ne développe pas de maladie.

Virus de l’herpès 1 et 2

Ces 2 virus peuvent cause des lésions infectieuses des lèvres et de la bouche (herpès 1) et des parties génitales (herpès 2, occasionnellement l’herpès 1)

La situation la plus commune que je rencontre se produit lorsqu’un enfant allaité développe une stomatite causée par l’herpès, des plaies dans la bouche, suffisamment douloureuse pour empêcher l’enfant de boire ou manger quoi que ce soit. Habituellement, bien que l’enfant refuse toute nourriture ou liquides, il continuera à prendre le sein et doit être encouragé à le faire. Néanmoins, si l’enfant refuse toute nourriture ou liquides, il devra parfois être hospitalisé pour une réhydratation par intraveineuse. Je crois que si l’enfant continue d’être allaité, l’hospitalisation est rarement nécessaire.

Herpes infection of the nipple of a breastfeeding mother.

Mamelon d’une mère dont l’enfant a développé une stomatite due à l’herpès 3 ou 4 jours
avant qu’elle ne souffre de ces lésions douloureuses. Elle continue à allaiter malgré la
douleur et une semaine plus tard à peu près, les plaies sont guéries et la douleur a disparu.

Cependant, il peut arriver que la mère développe des boutons sur les mamelons qui peuvent s’avérer douloureux. Comme pour les infections déjà mentionnées auparavant, la période d’incubation du virus de l’herpès avant que l’enfant ne développe des lésions prend environ une semaine. Donc la mère aura été infectée par l’enfant allaité plusieurs jours avant que l’enfant n’ait de plaies. La photo ci-dessous montrent une infection des mamelons par le virus de l’herpès.

Il est préférable que la mère continue à allaiter si elle le peut. L’extraction manuelle du lait afin de le donner au bébé est meilleure que le tirer à la pompe car une bonne extraction manuelle n’entraîne pas de pression sur les mamelons. Une pompe peut causer une douleur dans le mamelon et c’est fréquent.

Les médicaments, acyclovir et valacyclovir sont compatibles avec la continuation de l’allaitement.

La maladie de Lyme

La maladie de Lyme est provoquée par une bactérie transmise par la morsure d’une tique (en réalité, il existe de nombreuses différentes espèces de bactéries qui peuvent causer la maladie de Lyme dans les différentes régions d’Amérique du Nord et le reste du monde). C’est une maladie qui peut affecter plusieurs systèmes dans le corps, y compris la peau, les articulations, le coeur et le système nerveux central. La paralysie faciale, bien qu’elle puisse avoir plusieurs causes, devrait faire penser au médecin à la possibilité de la maladie de Lyme. Il semblerait que la tique doive s’être accrochée pendant plusieurs heures avant que la bactérie de la maladie de Lyme n’infecte la personne mordue.

On n’a pas retrouvé de bactérie vivante dans le lait maternel, bien que les études immunologiques aient retrouvé des marqueurs de la bactérie dans celui-ci. Cependant, même si la bactérie passe bien dans le lait, il est très peu vraisemblable que la bactérie traverse la barrière des facteurs immunitaires qui l’empêchent de passer la paroi intestinale et de pénétrer dans le système sanguin du bébé. La bactérie doit traverser cette barrière et donc passer la paroi intestinale pour pénétrer le flux sanguin du bébé pour causer une infection.

La question de savoir si le traitement de choix de la maladie de Lyme, la doxycycline, est contre-indiqué pendant l’allaitement est souvent posée. Il n’est pas contre-indiqué d’allaiter.

Certaines maladies non infectieuses

Il existe une multitude de maladies inflammatoires et auto-immunes, telles que l’arthrite rhumatoïde, le lupus érythémateux, le purpura thrombopénique immunologique, l’anémie hémolytique auto-immune, la thyroïdite auto-immune, et autres, qui y sont associés et probablement causés par des anticorps attaquant les différents tissus du corps. Dans le cas de l’arthrite rhumatoïde, ce sont les articulations du corps. Pour le lupus érythémateux, ce sont les différents tissus du corps. En ce qui concerne le purpura thrombopénique immunologique, ce sont les plaquettes sanguines qui aident à arrêter le saignement, etc…

Beaucoup de médecins semblent croire que la mère ne peut pas allaiter car les anticorps provoquant les maladies peuvent entrer dans le lait et causer la maladie chez le bébé. C’est clairement faux. Il existe différents types d’anticorps et ceux qui causent les maladies susmentionnées sont différents de ceux qui se trouvent normalement dans le lait maternel. Les anticorps (sIgA*) trouvés dans le lait maternel ont besoin d’un ajout pour permettre à ces anticorps de pénétrer dans le lait. De plus, ils disposent d’un élément supplémentaire qui les empêche d’être détruits dans le milieu acide de l’estomac de bébé. En conséquence, conseiller à la mère de ne pas allaiter par ce seul fait n’est absolument pas justifié.

Souvent, les médicaments à prendre pour les maladies susmentionnées, mais aussi pour la sclérose en plaque (probablement la maladie pour laquelle on m’interroge le plus souvent), et la dépression post-partum constituent la raison pour laquelle on recommande aux mères de ne pas allaiter. Comme évoqué dans un précédent article, la grande majorité des médicaments ne force par une mère à arrêter son allaitement.

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Droits d’auteur: Jack Newman, MD, FRCPC, Andrea Polokova, 2017, 2018, 2020

L'Allaitement Tout Un Art

Traduit par par L’Allaitement Tout Un Art (Ta Inthasoulot)